De la lumière à la poussière

Du 23/06/2023 au 15/07/2023

« De la lumière à la poussière » est le premier chapitre d’une trilogie marocaine que réalise Alexis Manchion. Cette aventure solaire se déroule dans la ville d’Essaouira. C’est une invitation à la contemplation d’un territoire en constante mutation où lumière et poussière s’entrechoquent en permanence. Un premier acte loin du Essaouira touristique... entre réalité très formelle et vision proche de la rêverie... C’est aussi le résultat d’un travail sur la lumière et son absence. C’est enfin une unité d’action, de lieu, de temps. Une quête photographique dans la ville d’Essaouira qui est ici un véritable théâtre visuel. Nous sommes les spectateurs d’une histoire racontée par l’image, livrés à notre tour à nos émotions.

Ce travail, qui est le premier chapitre d'une trilogie marocaine, est visible pour la première fois en exposition. Il fait aussi l'objet d'un prochain livre qui sera édité chez Hemeria à Paris, et qui sera possible de précommander à la galerie.

"C'est « solaire », voilà mon premier ressenti quand j'arrive à Essaouira. Il y a cette lumière très blanche, la température est élevée mais la puissance du vent rafraîchit le sentiment d’aridité. Oui, l'aéroport d'Essaouira est à lui seul un magnifique « spot » photographique perdu au milieu de... « rien ». Je sais alors tout de suite qu'il ne va pas être compliqué de faire de " bonnes images “. Essaouira est particulière, petite mais très touristique, ville bobo d'artistes et de kite-surfers, l'ambiance de la médina me semble être totalement « fake » et j'éprouve très rapidement le besoin d'en sortir pour voir l'envers du décor. Il suffit alors de marcher quelques minutes pour voir un tout autre paysage. Il y a toujours cette lumière, cette lumière forte, cette lumière   solaire. La belle plage pour touristes nettoyée tous les jours laisse la place à une autre que je qualifierai de poubelle à ciel ouvert où s'entassent des détritus à perte de vue. La vie touristique laisse place à une vie ouvrière, sale qui survit avec des conditions de travail  particulièrement précaires. Personne ne se plaint, tout le monde avance, fait le « job ». C'est la débrouille, tout est accumulé, entreposé. Les mélanges d'odeurs entre fabrication d'huile d'olive, tannerie ou vidange des réceptacles à sardines procurent une sensation olfactive assez puissante proche de la nausée. Pourtant, ce qui est frappant, c'est que tout semble normal à la limite de la logique, les gens semblent heureux, même si je sens bien le regard interrogatif « pourquoi tu ne vas pas faire des photos dans la médina ? ». Je comprends bien la gêne qui peut-être ressentie de voir quelqu'un, un étranger qui plus est, photographier un décor aussi éloigné de la carte postale ! Le soir venu, je rentre à la médina, il y a ces formes le long du mur ocre, ces arbres, cette chevelure d’herbes qui commencent à disparaître dans l’obscurité. Tout devient calme le temps d’une nuit avant de repartir marcher dans le brouhaha des constructions. Tout semble compliqué mais en même temps réalisable, « à la Marocaine » comme les travaux de la ville qui avancent à un rythme « différent ». C'est hors du temps, voir à l'arrêt, c'est une succession de tableaux tous plus irréels les uns des autres. On croirait parfois une zone de guerre, pourtant la vie est partout, vivante, bruyante, souriante et il y a ce sable, cette poussière qui rentrent dans la ville, inexorablement. De la lumière à la poussière... ” Le photographe Alexis Manchion.

Le photographe  : Né à Bobigny en 1987, diplômé de l’école EFET en 2011, Alexis façonne depuis sans relâche une œuvre globale aux multiples facettes...

Qu’elles soient appréhendées de manière directe sans artifice façon documentaire ou comme des œuvres d’art sous un angle plus plasticien, toutes ses photographies traitent des modifications de notre espace physique et de notre manière de l’occuper. Alexis évoque aussi la thématique de l’appartenance à notre société, l’accoutumance aux médias et objets de consommation ou encore notre relation au pouvoir.

Certains verront dans l’œuvre d’Alexis tous les petits liens entre ses différentes réalisations comme des obsessions récurrentes qui n’ont de cesse de le pousser à remettre en question notre vision du monde. D’autres seront certainement plus perdus face à cette créativité sans limite qui peut frôler l’indigestion et demande un certain temps pour être appréciée à sa juste valeur.

Pour faire simple, il ne s’interdit aucune façon d’envisager un projet et la multiplication des genres et thématiques lui permet d’aiguiser constamment son sens artistique. Adoptant la démarche d’un promeneur, Alexis utilise l’espace commun comme un gigantesque terrain de jeu.

Il trouve alors des liens sur chaque territoire qui progressivement participent à la création d’une œuvre globale.